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5 - Les procédures de jugement dites normales
L UNAFAM dénonce une dérive dans le traitement judiciaire des personnes malades et/ou handicapées psychiques
L étude des décisions de justice au cours des dernières décennies18 révèle une tendance générale de la justice pénale à interpréter l article 122-1 du Code Pénal de façon restrictive en ne reconnaissant qu'une altération partielle du discernement pendant la commission des crimes par les personnes souffrant de troubles psychiques, les tribunaux suivant en cela l'avis d experts des tribunaux enclins à la même orientation.
Les jurys des Cours d'assises se montrent en outre de plus en plus sensibles aux plaintes des victimes et préoccupés des risques de récidive en fin de peine, tendant ainsi à allonger celles-ci. Au lieu d'être orientés vers des soins dans un établissement psychiatrique, les personnes présentant des troubles psychiques sont, de ce fait, plus fréquemment condamnés aujourd'hui à des peines d'emprisonnement qui, paradoxalement, sont souvent plus lourdes que celles attribuées à des personnes non malades commettant les mêmes infractions pénales, au mépris de la loi qui invite à tenir compte de la pathologie de la personne.
L UNAFAM constate que, dans la pratique, les experts psychiatres appelés par la justice se limitent souvent à un entretien avec le prévenu sans rechercher une information complémentaire auprès du psychiatre qui le suivait jusque-là, ni auprès de son entourage. Intervenant plusieurs mois après la commission des faits, l expert rencontre en prison une personne qui n est plus dans la phase de décompensation ayant présidé à l acte délictueux et qui a souvent repris son traitement médical. Apporter dans ces conditions une réponse à la question « Au moment des faits le prévenu connaissait-il une abolition ou une altération partielle de son discernement ? » apparaît dès lors improbable, ce que reflètent les avis souvent divergents des experts.
L UNAFAM demande une réforme de l expertise psychiatrique améliorant sa qualité en la dotant de moyens donnant aux psychiatres qui la pratiquent le temps nécessaire à la compréhension de la personnalité et de la pathologie du prévenu, grâce notamment à l accès à son dossier médical, à la consultation des médecins traitants et à la rencontre des proches. Elle demande aussi que les magistrats reçoivent, au cours de leur formation, une sensibilisation à la compréhension de ce que sont les troubles psychiques.
18 Caroline Guibet-Lafaye, Camille Lancelevée et Caroline Protais,: L irresponsabilité pénale au prisme des représentations sociales de la folie et de la responsabilité des personnes souffrant de troubles mentaux, - Recherche réalisée avec le soutien de la Mission de recherche Droit et Justice - octobre 2016