Les préjugés enferment. Combattons-les !
4 mai 2022
Lettre de la Présidente
La France a choisi son Président. Comme nous l’avions porté durant cette campagne, nous espérons que le nouveau gouvernement fera de la santé mentale et de la psychiatrie une grande cause nationale. Placer cette ambition au cœur de l’action serait passer des mots aux actes. Les Assises de la psychiatrie et de la santé mentale ont constitué un temps fort, il faut maintenant le transformer !
Dans cette lettre, nous nous réjouissons du décret sur la Prestation de compensation du handicap (PCH), sorti à un moment où on n’y croyait plus. "La cause est juste", mais c’est l’opiniâtreté des associations qui a permis de réécrire l’annexe 2.5 du Code de l’action sociale et des familles (CASF) et de donner accès à la PCH aide humaine aux personnes présentant des altérations des fonctions mentales, cognitives, psychiques ou des troubles du neurodéveloppement. Il reste encore du travail pour une application effective sur le terrain. Avec vous, nous serons au rendez-vous.
Mais nous sommes en colère. Au travers du décret sur l’irresponsabilité pénale, force est de constater que les préjugés conduisent encore à traiter avec mépris les droits des personnes concernées par des troubles psychiques. Bien sûr que nous soutenons nos proches pour qu’ils adhèrent aux traitements qui leur permettent de vivre leur vie le plus paisiblement possible. Mais nous savons aussi que cette adhésion a un prix (fatigue, somnolence, prise de poids, perte de la libido...), et qu’il y a des moments où prendre son traitement ou se déplacer vers un lieu de soin est trop lourd. Nous ne pouvons accepter que de tels choix puissent les condamner ! Un adhérent nous dit "C'est souvent nous-mêmes, avec les accompagnants du Service d'accompagnement médico-social pour adultes handicapés (SAMSAH), qui le remettons sur les rails pour la prise du traitement injectable… C'est une aide autour de lui et non pas une sanction pénale qui peut l'aider !”.
Et c’est comme si cette période était l’occasion de sortir les décrets répressifs que les ministres avaient encore dans leurs tiroirs. Un texte paru au journal officiel ce 28 avril autorise à étendre le périmètre des personnes auxquelles sont transmises les données du fichier Hopsyweb (fichier national répertoriant des informations administratives et médicales sur les personnes ayant fait l’objet de soins psychiatriques sans consentement). Ces données pourront être transmises au représentant de l’Etat du département ainsi qu’à des services de renseignements. Ce décret, comme les précédents sur le sujet, rompt le secret médical et bafoue le droit à l’oubli. Et pourtant, à ce jour, les psychiatres vous le diront : "Il n’y a pas de corrélation entre la radicalisation et les pathologies psychiatriques ayant pu conduire à des soins sans consentement".
Les préjugés enferment très sûrement les personnes vivant avec des troubles psychiques. Ils balaient tous les messages de rétablissement portés par les soignants, les usagers ou leurs familles. Combattons-les.
▪ Marie-Jeanne Richard, Présidente